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Ce qu’ils en disent : Michel Moreau, guide haute montagne, main dans la main avec les pisteurs
2 décembre 2024
Quel lien entretenez-vous avec la Régie des Pistes dans votre travail de guide ?
Essentiellement des liens d’amitiés, tissés durant les 40 années de l’exercice de ma profession de guide l’hiver à Val d’Isère. La connaissance de terrain que peut avoir un pisteur sur son secteur est un atout majeur pour un guide ou un moniteur appelé à le parcourir. J’ai toujours entretenu des échanges avec les pisteurs, car leurs renseignements quotidiens ont éclairé efficacement ma route. Cependant, nos échanges ont été à double sens, je leur rapportais de mon côté les observations que j’avais pu faire dans les autres secteurs de la montagne qu’ils ne parcouraient pas. Toutefois, c’est une façon de fonctionner qui n’est pas adoptée par tous les professionnels. Ici comme ailleurs les castes ont un peu de mal à se mélanger…!
Quelle est, selon vous, l’importance des pisteurs dans la sécurité en montagne, en dehors des pistes balisées ?
Une grande importance bien sûr ! Si les pisteurs interviennent sur pistes, ils sont constamment sollicités hors-pistes et quelques fois dans des zones compliquées d’accès. Quand en fin de journée par mauvais temps, il faut aller récupérer des skieurs imprudents naufragés dans les Gorges de Malpasset, sans pouvoir utiliser l’hélicoptère, ça demande un savoir-faire, un courage et une abnégation tout à fait remarquable. Comme disait mon père, il y en a qui ont eu la légion d’honneur pour bien moins que ça…!
Pouvez-vous nous partager une anecdote marquante de collaboration avec les pisteurs à Val d’Isère ?
Oui, il y en a eu beaucoup, comme lors d’une immense avalanche dans la combe de Cugnaï que je découvrais en montant par le télésiège de l’Arselle et que je rapportais au chef de secteur de Solaise. Quelques minutes plus tard, Michel Bonnevie me réquisitionna pour intervenir avec lui en renfort sur l’avalanche. Étant donnée l’ampleur de l’événement et le nombre important de skieurs dans la combe, c’était un miracle qu’il n’y eu qu’un enseveli. Cependant une bonne quarantaine de skieurs en état de choc erraient autour des secours, les gênant dans leur action. Alors, Jean-Pierre Aguilon qui supervisait le secours sur place me demanda de récupérer tous ces rescapés et de les acheminer dans la vallée. C’est comme ça que je me suis retrouvé avec le plus grand groupe que je n’avais jamais eu sous ma responsabilité depuis mon service militaire dans les chasseurs alpins…!
Comment voyez-vous l’évolution de la gestion des pistes et de la sécurité en montagne dans les années à venir ?
À vrai dire je ne la vois pas – tant de facteurs peuvent intervenir dans cette évolution-, mais j’ai des souhaits. Notamment celui de rendre les pistes plus sûres, de sortir de cet espèce de lieu de non-droit qu’elles sont devenues. C’est tout de même insensé que dans une journée de ski de montagne, dans un milieu à risque, les seuls moments qui m’inquiètent sont ceux où j’utilise les pistes damées, ouvertes et balisées. Il y a un réel travail à faire pour les rendre plus paisibles et ça ne passe pas par le matériel, mais par l’éducation. Je ne pense pas que ce soit utopique, mais il faut sérieusement s’y mettre. Quant à la sécurité en montagne, c’est la même chose, nous avons les matériels nécessaires, ce qui manque c’est la bonne attitude et encore une fois cela passe par l’éducation des skieurs. Les montagnes sont encore là pour un bon moment, il y a des jours et des secteurs où elles ne sont pas fréquentables, alors avec un peu de sagesse et de patience, on peut aller très loin, très haut.